1er octobre 1830 ... Les Volontaires Vedrinois et des Patriotes délogent les troupes hollandaises de Namur
NAMUR EN 1830
Namur est, après Anvers, la place forte la plus importante des Pays-Bas du Sud. Elle est dotée d’une importante garnison de 2 à 3.000 hommes, presque tous hollandais, commandés par un Gantois, le général Van Geen. 120 canons sont disposés en batterie à la Citadelle.
L'autorité communale est exercée par un bourgmestre et deux échevins, présidant un conseil de notables, la Régence. Namur est le siège d'un évêché et le chef-lieu de la Province du même nom. Son gouverneur, Jean-Baptiste d'Omalius d'Halloy est un éminent géologue.
La ville compte environ 20.000 habitants, tant à l'intérieur de son enceinte bastionnée que dans ses faubourgs. Namur n'est pas une ville riche. Ouvriers, artisans, petits patrons, petits commerçants connaissent la crise. Certains quartiers sont miséreux.
La bourgeoisie compte dans ses rangs des fonctionnaires, des magistrats, des gens de loi, des enseignants et des ecclésiastiques. Peu d'industriels.
Comme à Bruxelles, les difficultés économiques auxquelles sont confrontés les travailleurs déclencheront la révolte populaire.
Les impôts, la suppression du jury des cours d'assises, des séminaires épiscopaux, l'expulsion des Frères des écoles chrétiennes, les procès de presse, la présence quotidienne du néerlandais, apparaissent comme des brimades et rappellent le service militaire où tous les commandements étaient donnés en cette langue.
"Le Courrier de la Sambre", dirigé par l'avocat Braas, se fait l'organe du libéralisme, de la classe ouvrière et surtout de l'opposition à la Hollande. De multiples pétitions parviennent à La Haye exprimant la désaffection du peuple pour le régime.
AOUT SOUFFLE UN VENT DE REVOLTE
Le 26 août 1830, à l’Hôtel d’Harscamp, les voyageurs descendant de la diligence de Bruxelles racontent ce qui s'est passé dans la ville. Des bruits courent et la nervosité croît. Aux alentours du Marché aux Grains, quelques mouvements séditieux se produisent. La Régence prend aussitôt diverses mesures de sécurité et notamment met sur pied une garde bourgeoise de 130 hommes, commandés par le Comte de Quarré.
La garde inexpérimentée s'avère incapable à contrôler les mouvements séditieux qui s'amplifient au cours des journées suivantes. Le commandant militaire Van Geen va assurer l'ordre public et parvient à disperser sans heurts un nouveau rassemblement populaire le 30 août.
Le 4 septembre, le "Courrier de la Sambre" diffuse la fausse information que 600 habitants de Rotterdam veulent marcher sur la Belgique et d'ajouter que "c'est là (à Bruxelles), si le sang doit couler, que la bataille s'engagera".
Le 6 septembre, on sait que le roi a refusé de recevoir les personnalités namuroises, porteurs d’une pétition : ceux-ci l'assurent de leur fidélité, à condition que le gouvernement cesse de prendre des mesures à l’encontre des intérêts des provinces du Sud.
A Namur Le cours des événements s’accélère : on s'attroupe à nouveau dans la rue, on entend des "Marseillaise" et des "Brabançonne", on brandit un drapeau noir-jaune-rouge, l'ancien étendard brabançon, on invite le peuple à prendre les armes. La Régence oblige tous les hommes de 18 à 50 ans à entrer dans la garde bourgeoise. Van Geen reçoit une lettre du prince Frédéric, fils du roi Guillaume, interdisant tout rassemblement dans les villes fortes.
Bien que la ville "continue de jouir d'une tranquillité apparente", l'état de siège à partir de 18 heures est décrété le 23 septembre. On enregistre quelques désertions dans l’armée.
A La Haye, les Etats Généraux ont voté une adresse tendant à séparer le Nord et le Sud.
Entretemps, les troupes du prince Frédéric ont investi Bruxelles où les esprits sont particulièrement remontés. Une centaine de Namurois appartenant à tous les milieux sociaux marche pour prêter main forte aux Bruxellois. Une lettre adressée par un jeune brasseur namurois, Pierre-Isidore Gillain à ses parents, juste avant le coup de feu: "Jeudi, jour mémorable où les Belges se sont immortalisés (...) Je suis décidé de mourir plutôt que de céder à ces lâches Hollandais (...) Peut-être que ce soir, nous serons maîtres du Parc; mon courage ne se ralentira pas et si je dois mourir, consolez-vous et vous direz que votre fils est mort pour la liberté (...)". Les combats de rue y feront trois tués dans leurs rangs et onze blessés graves.
Le 27 septembre à Namur, l’annonce de la victoire des Patriotes à Bruxelles n'entraîne aucune réaction violente de la part de la population.
NAMUR AUX BARRICADES
Le 30 septembre, on apprend en ville qu'une mutinerie a eu lieu à la citadelle et que le moral des troupes est mauvais. On voit sortir de la forteresse un millier de jeunes recrues.
Le lendemain 1er octobre, des hommes se présentent sur la Place d'Armes et réclament des armes aux corps de garde ... Soudain un coup de feu claque, suivi d'une fusillade. Des hommes s'écroulent, d'autres sont grièvement blessés. C'est le déchaînement de l'émeute: on dépave les rues, on dresse des barricades, on désarme la troupe, on prend la Porte de Grognon, pourtant sous le feu de la citadelle vers laquelle les Hollandais se retirent péniblement.
Constant de Montpellier de Vedrin appartient à une très ancienne famille du Namurois. A la tête des Volontaires de Vedrin, il s'était déjà distingué dans les combats de Bruxelles les 25 et 26 septembre. Il revient combattre à Namur avec ses hommes. « C'est à la voix mâle et énergique de ce grand citoyen, écrira un biographe qui avait combattu sous ses ordres, que les habitants de Vedrin se rassemblèrent le 1er octobre pour marcher sur Namur, dès que le son du canon et du tocsin les eut avertis que les Namurois étaient aux prises avec les Hollandais... ».
La Porte Saint-Nicolas est au coeur des combats. Elle est une des portes les mieux équipées et bien défendue par les canonniers hollandais. A la tête de ses Volontaires, donnant l'exemple du courage et du sang froid, il se posta fort avantageusement pour faire pleuvoir une grêle de balles dans les rangs des soldats hollandais. Les Volontaires de Sclayn et ceux d'Andenne étant arrivés en renfort, ils s'emparèrent ensemble de cette porte, qui était aussi attaquée de l'intérieur par des Namurois. A 15 heures, la porte appartient définitivement aux Namurois.
La perte des portes Saint-Nicolas et de Fer porta un coup fatal aux Hollandais et tandis qu’ils remontent à la citadelle, on compte les morts - une trentaine - et l'on soigne les blessés. 24 immeubles ont été sinistrés.
Van Geen, enfermé dans la citadelle, refuse l'idée même de la reddition. Il menace de bombarder la ville.
Une rébellion éclate avec les derniers soldats belges de la citadelle qui s'y trouvaient encore. Le lieutenant Eenens, retourne la batterie qu'il commande vers la garnison hollandaise. Van Geen, isolé, affamé, démoralisé par la nouvelle de la chute de Philippeville dont il attendait du renfort, accepte alors de hisser le drapeau blanc. Il a 48 heures pour quitter Namur.
Le 3 octobre, le Baron de Stassart devient gouverneur de la province ; le lieutenant-colonel Boucher, promu commandant provisoire de la place de Namur et Jean-Baptiste Brabant, le premier bourgmestre.
Dans les journées qui suivirent, une simple croix de bois est plantée sur la Place du Palais de Justice. Au même endroit, sera élevé par la suite un monument aux morts namurois de 1830, aujourd’hui relégué au cimetière de Namur, à Belgrade.
Et la vie se normalisa rapidement.
Namur, vue de la Citadelle, côté Sambre, gravure, ca. 1826
Namur, Confluent et Porte de Gravière, gravure, ca. 1840
Namur, pont de la Rue du Pont, Porte de Sambre, gravure de William Finden, ca. 1830
Namur, vue de la Citadelle, côté Meuse, gravure de Howen ca. 1825
Constant de Montpellier, en tenue de colonel de la Garde Civique, ca. 1832
Drapeau d'Honneur remis aux Volontaires vedrinois le 19 décembre 1830 par la Ville de Namur.
Le 19 décembre 1830 lors d’une cérémonie sur la Grand-Place (Place d'Armes), la Ville de Namur remit un drapeau d'honneur à la commune de Vedrin en souvenir et en récompense de la part qu'elle avait prise dans les combats qui s'étaient déroulés le 1er octobre.
Ce drapeau fut confié par le dernier bourgmestre de Vedrin à la Marche Saint-Eloi qui venait de créer une compagnie de Volontaires.
Constatant la fragilité de ce vénérable emblème, l'association eut la bonne idée de faire réaliser une copie pour ses défilés.
Les Volontaires 1830 de Vedrin, vêtus de sarraus bleus et armés, escortent ce drapeau, chaque année le troisième dimanche de septembre, au Pèlerinage du Souvenir lors des Fêtes de Wallonie de Namur.
Au son des tambours et des fifres, Les Volontaires 1830 de Vedrin participent également à diverses manifestations patriotiques : commémoration des journées de Septembre à Bruxelles, Relais Sacré …
Sources :
- La révolution de 1830 à Namur, dans Confluent n°420 du 9 septembre 2011.
- Les événements de 1830, Le Guetteur Wallon n°3 - 1988.
- Le Pays de Namur et la Révolution de 1830, Ernest Fivet, Le Guetteur Wallon n°3, 1929
- Calendrier namurois, Marc Ronvaux.
- http://valoudenam.skyrock.com/tags/7A3shn2xahT-histoire-namur.html